Ma connivence avec l’écriture s’est inscrite très tôt dans l’enfance avant même le temps de la lecture, avec la rencontre des gros dictionnaires à couverture rouge. Je les feuilletais comme des livres d’images dont les têtes de chapitres aux lettres ornées me faisaient rêver.


Plus tard il y eut les études d’Arts Plastiques, avec toujours une attirance pour le lettrisme, et l’importance des rencontres avec des amis écrivains, typographes, calligraphes.


Cependant le signe n’apparaissait pas dans ma pratique artistique, jusqu’au jour où il y eut le hasard d’une rencontre, le cadeau d’un stylo pinceau japonais et la fulgurance d’une révélation : la jubilation de se lancer dans la calligraphie et l’émerveillement d’être enfin en totale connivence avec une expression.


Alors, depuis j’écris… J’écris au delà du signifiant, dans une imitation de la trace, avec le bonheur de me sentir chorégraphe, musicienne, et surtout calligraphe par le rythme et le développement du geste, la poursuite de l’équilibre entre le vide et le plein… faisant totalement miennes ces paroles de Jérôme Peignot : « Dans l’art de mettre l’écriture entre le sens et le non-sens, les signes, par leur seule magie, ne suffiraient-ils pas à dire le seul sens qui vaille ? »


Celui de la liberté, pourrais-je ajouter.


C’est ainsi que le hasard a fait complètement basculer mon champ de pratique artistique. Depuis, je n’ai plus jamais cessé de jouer avec l’écriture ou plutôt la contre-écriture.


J’ai donc décidé de cheminer sur une ligne de crête, ni tout à fait dans la peinture ni tout à fait dans l’écriture, me laissant happer par des thèmes des plus divers. De même qu’un metteur en scène peut avoir un acteur ou une actrice de prédilection, j’intègre ma calligraphie dans des scénographies différentes selon les hasards de la vie.


En fait si je devais définir ma démarche, je dirais que je suis une voyageuse immobile qui a ses livres et ses pinceaux pour véhicule de prédilection…

C’est la distance qui me fait rêver.